Ce virus qui nous a empêché de la prendre dans nos bras, de la caresser, de l’embrasser, de lui prendre la main…


Depuis 10 jours, ma sœur et moi sommes au chevet de maman, en fin de vie dans l’EHPAD où elle est résidente depuis quelques années.
Elle n’atteindra pas ses 100 ans, que lui aurions fêté le 1er août prochain.

La Covid est passée par là…sauf que…
Depuis 1 an, visites interrompues, résidents isolés dans leur chambre, puis quelques visites drastiques autorisées, à nouveau plus de visites, et depuis 2 mois et demi, visites sur rendez vous, 2 fois une demi heure par semaine, dans le hall d’entrée, sous l’œil vigilant d’une « gardienne », nous interdisant tout geste de tendresse.

A chaque visite, même si maman avait des difficultés à nous reconnaître et à nous parler, elle se plaignait d’avoir « mal aux fesses ». Elle en souffrait déjà avant le confinement, et l’ayant signalé, on nous a répondu « c’est juste une plaque rouge, on la soigne….. »

Impossible de vérifier quoi que ce soit, plus d’échanges avec du personnel qui changeait constamment (stagiaires, débutantes, remplaçantes)

Il y a un mois, alors que maman était toujours installée dans un fauteuil devenu inconfortable, attachée à la taille et entre les jambes afin qu’elle ne glisse pas, on nous a annoncé qu’une escarre devenue profonde expliquait ses souffrances atroces.(cela allait atteindre l’os nous a –t-on dit)

Ensuite, malgré une installation dans un fauteuil coquille plus confortable, la douleur est devenue si insupportable que le médecin attaché à l’EHPAD a décidé (avec notre autorisation) d’administrer de la morphine à maman.

A présent, nous sommes « autorisées » à être auprès de maman autant que nous le souhaitons, à chaque moment de la journée.

Depuis 1 an, alors qu’au sein de l’EHPAD on veillait à ce que nos proches soient isolés, à l’abri du virus et de cette épidémie, et surtout à l’abri de leur famille « indisciplinée », les autres maux étaient toujours là, et continuaient à faire leurs ravages.

Aujourd’hui, nous considérons que maman est une « victime collatérale » de ce virus, qui nous a empêché de la prendre dans nos bras, de la caresser, de l’embrasser, de lui prendre la main… tous ces gestes d’amour que nous nous permettons à présent, mais un peu tard.

Anonyme